Il y a encore 3 ans, la France ne semblait pas prête à développer sérieusement l’écosystème nécessaire pour un déploiement massif des voitures électriques. Inversant cette tendance, le gouvernement français a d’abord engagé un programme majeur d’aides aux constructeurs automobiles et proposé des mesures incitatives pour les consommateurs. Cela s’inscrit dans la tendance stratégique actuelle menant vers une production française de lithium.
La décision du Parlement européen d’orchestrer la fin de la vente de voitures thermiques en 2035 joue évidemment un rôle crucial dans l’adoption du véhicule électrique. Cela s’est ressenti par une croissance de 394% des nouvelles immatriculations françaises depuis 2020, tendance qui devrait encore s’accélérer sur les 10 prochaines années, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
Or, la production de batteries pour les véhicules électriques demande de grandes quantités de matière première, telles que le nickel, le cobalt ou bien sûr le lithium. Ces matériaux sont disponibles en quantité limitée, en raison d’abord de leur rareté, mais aussi des problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement mondiale.
Pour pallier ce problème de dépendance énergétique, des mines sont en cours d’ouverture en Europe, et notamment en France dans le Massif Central et dans les Vosges. Ces nouvelles sources d’approvisionnement permettront de garantir en partie la souveraineté nationale et un accès constant à ces ressources stratégiques. Par ailleurs, les consommateurs européens profiteront d’une production locale qui sera, à n’en pas douter, plus regardante sur le respect de l’environnement et du droit humain.
LA NOUVELLE DONNE MONDIALE DE PRODUCTION DE LITHIUM
Si dans les années 90, les États-Unis étaient en tête de la production de lithium mondial, ils occupent désormais la 8e place, très loin derrière les leaders du secteur. L’Australie (50 000 tonnes en 2021), le Chili (26 000 tonnes en 2021) et la Chine (14 000 tonnes en 2021) produisent à eux 3 près de 90% du lithium à l’échelle mondiale. La production a connu une croissance de plus de 1000% entre 1995 et 2021, et continue d’augmenter de manière exponentielle. La barre symbolique des 100 000 tonnes par an a été dépassée en 2021 (soit une production multipliée par 4 par rapport à 2010). Les autres acteurs significatifs du secteur sont l’Argentine, le Brésil ou encore le Zimbabwe.
Les capacités mondiales de raffinage, quant à elles, sont actuellement trustées à 60% par la Chine.
Si l’on suit les courbes d’augmentation constante de la fabrication de véhicules électriques, le besoin en lithium devrait atteindre 1,5 million de tonnes en 2025 et dépasser largement les 3 millions à l’horizon 2030. Cette trajectoire actuelle pose plus que jamais d’importantes questions environnementales et géostratégiques, notamment celles relatives à l’accès et à l’épuisement de ce type de ressources.
LA FRANCE OUVRE SES PROPRES SITES D’EXTRACTION
Fin octobre 2022, Emmanuel Macron a annoncé le développement d’un « nouveau code minier », ouvrant la voie vers une production française de lithium. Et fin novembre, l’Observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles (Ofremi) était créé pour sécuriser l’approvisionnement national, ouvrant un cadre de développement de projets miniers sur le sol français.
Dans le même temps, le groupe minier français Eramet et Électricité de Strasbourg ont signé un protocole d’accord exclusif pour étudier un projet de production de lithium en Alsace. Les perspectives annoncées sont de 10 000 tonnes d’extraction annuelle, permettant de produire 250 000 batteries de véhicules électriques par an.
La coopération porte à terme sur l’extraction, le raffinage et la production de lithium géothermal. Si les deux groupes travaillent depuis 2020 à des expérimentations prometteuses sur des centrales géothermiques en Alsace, l’exploitation au niveau industrielle ne démarrera qu’à la fin de la décennie en cours.
Autre projet majeur, présenté cette fois par le groupe français de minéraux industriels Imerys, la construction de la deuxième plus grande mine européenne de lithium devrait voir le jour d’ici 2027 dans l’Allier (ressources estimées au minimum à 1 million de tonnes). Elle permettra à terme d’équiper annuellement en batteries lithium-ion l’équivalent de 700 000 véhicules électriques.
En attendant de pouvoir profiter d’une nouvelle source d’approvisionnement : les cellules recyclées et reconditionnées !
Crédit « Vers une production française de lithium » : @Juan Roballo – Shutterstock / @Flickr – Earthworks